L'Institut Bordelais de la Vision vous invite à vous replonger de nouveau dans l'Histoire, afin de suivre l'évolution du traitement des amétropies. Dans notre dernier article de cette grande saga historique sur l’histoire du traitement des amétropies ; telles que sont la myopie, l’astigmatisme, l’hypermétropie ou la presbytie ; nous avions laissé l'homme de la Renaissance et ses premières « vrais lunettes », encore appelée bésicles à cette époque entre les mains nouvellement expertes des premiers opticiens. Nous allons voir que ces évolutions techniques de traitement des verres, vont également subir une très forte amélioration du savoir théorique tant dans le domaine de l'optique que de l'anatomique de l'œil.
La Renaissance est une période où les lunettes vont connaitre de très nombreuses évolutions. Dans la manière et l'occasion de les porter, les lunettes vont venir petit à petit s'introduire dans la société. Dans un premier temps, elles sont synonymes de savoir, car les porter véhicule l’idée d’une pratique de la lecture, et donc l'acquisition potentielle d'un grand savoir.
Au milieu du XVème siècle, sous l'impulsion de l'essor de la profession d'opticien et de la reconnaissance de la société jusque-là très timide, voire inexistante au Moyen âge, les bésicles vont également beaucoup changer de forme, et d'appellation : Elles passeront simultanément de monocle à pince nez. D'abord sans branches, elles seront ensuite affublées d'une tige, et seront appelées Lorgnettes. Puis glisseront progressivement vers une forme plus contemporaine, des branches étant finalement ajoutées, pour finalement devenir un accessoire bourgeois et distingué.
Au XVIème siècle, Giambattista Della Porte, inspiré par Aristote, décrit diverses expériences optiques sur les lentilles et les miroirs concaves, conduisant à l'établissement des premières analyses de la réflexion de la lumière. Sans pour autant être des canons scientifiques, elles soulèvent de réelles interrogations théoriques.
Le savoir ancestral d'Alhazen est ainsi perfectionné par de nombreux érudits, notamment Léonard de Vinci. Le grand génie de la renaissance va analyser le fonctionnement de la camera obscura, ou chambre noire sous ses moindres détails en 1508. L’expérience de la boite noire consiste à faire pénétrer de la lumière à travers le trou d’un diaphragme à taille variable pour qu’elle se retrouve projetée sur un écran au fond de la boite. L’image sur l’écran est alors retournée. Plus le trou est petit, plus l’image est nette, du fait du nombre réduit de rayons lumineux passant au travers. Plus le trou est grand, et plus le nombre de rayons passant est important, et plus l’image est floue. Leonard de Vinci, va ainsi obtenir une compréhension avancée du fonctionnement de la lumière, et de la vision A cette période, Il va également pousser très loin l'analyse anatomique de l'œil humain et théoriser les premières lentilles de contact dans son Codex de l'oeil.
En 1604, Johannes Kepler, va confondre pour la première fois le fonctionnement de la chambre noire, avec celui de l'œil humain, dans son ouvrage « Paralipomènes à Vitellion », expliquant les mécanismes de la vision, sans même que les lois de la réfractions aient été énoncées.
En 1609, la première lunette d'approche, ou longue vue, est créée sous l'impulsion de Galilée. Elle est constituée d’un objectif convergent et d’un oculaire divergent fixés dans deux tubes distincts (en bois, en carton, en plomb...) coulissant l’un dans l’autre.
Cet outil d'optique est formé de deux tubes différents, l'un rentrant dans l'autre, ayant un objectif convergent pour le premier, un oculaire divergent pour le second. Le grossissement obtenu est de 3, c’est-à-dire 3x ce qui est perçu par l'œil humain. C'est une prouesse technologique.
Kepler prend connaissance de l'outil, et l'étudie à son tour, repoussant rapidement le grossissement à 35. Allongée de plus en plus, la lunette d'approche verra son grossissement sans cesse augmenté. L'ancêtre du télescope est né. Il n’est toujours pas question ici de soigner la myopie, l’hypermetropie l’astigmatisme ou la presbytie, mais les avancées pour y parvenir sont considérables.
En 1611, dans son ouvrage « Dioptrice », Johannes Kepler pose les principes fondamentaux de l’optique moderne, en regroupant tous les savoirs jusqu'alors acquis dans les domaines de la lumière, des lentilles, de la réfraction, des principes régissants les miroirs plans et courbes, et fonde ainsi une nouvelle discipline fièrement nommée : L'optique.
Rapidement la diffusion des lunettes devient de plus en plus importante. On en retrouve des représentations dans de nombreux tableaux, confirmant encore un peu plus en plus sa symbolique de l'érudition, d'un certain statut social.
Au milieu du XVIIème siècle, Jacques Bourgeois à Paris améliora l'analyse des lentilles optique en imaginant des verres concave coté œil (intérieur de la lunette) et convexe de l’autre côté, inventant ainsi le ménisque convergent.
Cela permit une diminution des aberrations gênantes sur les verres habituels. Et consacre la maitrise technique du façonnage des lentilles.
Ainsi la Renaissance, fut la naissance des lunettes, avec une forme très proche de celles que nous les portons aujourd'hui. La technique optique et maitrise de la fabrication du verre suivant différentes formes, concaves, convexes, ainsi que des formes plus complexes, comme le ménisque convergent, ont permis de soigner progressivement les amétropies. Presbytie et myopie furent les premières à être traitées. La Renaissance a ainsi permis une puissante envolée de la recherche optique qui se poursuivra pendant la période contemporaine. Elle a également imposé le port des lunettes comme la meilleure réponse au défaut visuels, et à banalisé son utilisation en société. Une maîtrise de plus en plus pointue des techniques de traitement des défauts visuels via la taille des verres à également été amorcée durant cette période, consacrant les disciplines et les sciences optiques. Et c’est bien les lois de l’optiques poussées à leur maitrise extrême qui permettrons plus tard la création des lasers, dont le laser femtoseconde utilisé pour pratiquer la chirurgie refractive fait partie. L’œil myope, hypermetrope astigmate et presbyte est sur le point de trouver solution à ses maux, que nous continuerons de développer dans notre prochain article consacré au traitement des ametropies au cours de l’histoire de l’homme.